Roxanne Varza est la directrice à succès de Station F, la plus grande communauté de startups au monde, scout pour Sequoia Capital, et désormais fondatrice de Gold Diggers, un syndicat d’investissement réservé aux femmes.
Dans cet entretien, Roxanne explique à Roundtable comment un groupe WhatsApp est devenu, via Gold Diggers, un syndicat de femmes investisseuses de premier plan — et pourquoi les femmes devraient revoir les idées reçues sur ce que signifie « être investisseuse ».
Points clés :
- Un groupe d’angels devient une communauté publique pour gagner en visibilité et faciliter l’accès des femmes aux deals.
- Mission : diversifier les cap tables et encourager davantage de femmes à investir, dès les premiers tours.
- Femmes actives dans l’écosystème (startups, fondatrices, investisseuses) prêtes à s’impliquer avec un minimum d’activité annuel.
- Sourcing porté par un réseau d’investisseuses et d’ex‑fondatrices ; gestion transparente des conflits d’intérêts (déclaration, retrait des décisions).
- Gold Diggers est indépendant mais complémentaire de Station F ; objectif : plus de femmes dès le départ dans les entreprises ambitieuses.
Roundtable : Comment est né Gold Diggers ?
Roxanne Varza : Au départ, c’était un groupe WhatsApp d’environ cinq business angels femmes, pour partager du dealflow et échanger sur les dossiers. Nous avons réalisé que de plus en plus d’entreprises voulaient diversifier leur cap table, mais ne savaient pas où trouver des investisseuses, et nous avons constaté que beaucoup de femmes aiment soutenir des projets ensemble — l’angel investing est assez social. Petit à petit, des personnes nous recommandaient d’autres femmes qui demandaient à rejoindre le groupe. Aujourd’hui, tout le monde partage des deals et veut co‑investir, donc il était naturel de créer cette communauté sur Roundtable.
Roundtable : Qu’espérez‑vous en ouvrant votre syndicat sur Roundtable ?
Roxanne Varza : Jusqu’ici, nous étions un groupe WhatsApp. Nos réseaux nous connaissent, mais nous ne sommes pas très visibles — on a plutôt entendu parler de nous discrètement. C’est un peu notre coming out, si vous voulez ! Nous espérons aussi rendre le groupe plus accessible à d’autres femmes. L’objectif, c’est d’inciter davantage d’acteurs à faire de la place aux femmes sur leur cap table et d’encourager plus de femmes à investir. Nous pensons que Roundtable est une excellente plateforme pour ça.
Roundtable : Puisque Station F vise aussi à accompagner les entreprises, pourquoi créer Gold Diggers ?
Roxanne Varza : Station F n’a commencé à investir que l’année dernière, et uniquement dans quelques entreprises d’élite, via le programme Future 40. C’est un entonnoir très spécifique avec des deals très ciblés.
Gold Diggers, c’est tout autre chose. Nous cherchons à travailler avec des fondateurs vraiment conscients des enjeux d’égalité dès la construction de leur entreprise, et qui veulent plus de femmes autour de la table dès le début. Je pense que toute entreprise qui ambitionne de devenir leader devra le faire. Gold Diggers est compatible et complémentaire de ce que nous faisons à Station F — ni en concurrence ni en remplacement.
Gold Diggers, c’est d’abord une démarche de genre, cruciale aujourd’hui, pour assurer une bonne représentation dans l’entreprise dès le départ. Mais au‑delà de l’angle « genre », nous réunissons des femmes exceptionnelles. Notre communauté compte parmi les meilleures investisseuses de l’écosystème français, et au‑delà.
Roundtable : Qui souhaitez‑vous recruter pour rejoindre Gold Diggers ?
Roxanne Varza : Nous cherchons des femmes déjà actives dans l’écosystème : salariées d’une startup, fondatrices, ou ayant déjà investi. Nous demandons aussi un seuil d’activité pour l’année à venir — s’engager à réaliser un minimum de deals. Tous les détails sont sur notre page Roundtable.
Roundtable : Comment allez‑vous sourcer les deals ?
Roxanne Varza : Beaucoup de membres ont un excellent accès au dealflow. Plusieurs sont investisseuses actives ou anciennes fondatrices, donc nous comptons sur le réseau pour accéder aux opportunités. Les entreprises cherchent plus de femmes sur leur cap table, ce qui attirera vers nous des deals plus ouverts au genre.
Roundtable : Comment gérerez‑vous le dealflow du syndicat avec vos activités Station F et Sequoia ?
Roxanne Varza : Je ne pourrai pas partager tout le dealflow que je reçois via Sequoia, certains dossiers n’étant pas pertinents. En tant qu’investisseuse, je n’essaie pas de pousser les entreprises de Station F ; cela ne m’empêchera pas de les partager avec le groupe, mais je ne serai pas décisionnaire pour ces dossiers. C’est ainsi que nous gèrerons les conflits d’intérêts : dès qu’il y en a un, la personne le déclare et ne participe pas à la décision.
Roundtable : Qu’est‑ce qui, selon vous, distingue les investisseuses ? Et pourquoi y en a‑t‑il encore relativement peu ?
Roxanne Varza : Dans notre communauté, j’observe que beaucoup de femmes sont très sensibles aux entreprises à mission et à impact. Elles ne veulent pas investir dans tout et n’importe quoi. Elles recherchent des équipes où il y a déjà une fondatrice ou d’autres femmes à la cap table — elles ne veulent pas évoluer dans un environnement trop macho.
Côté projets, beaucoup posent la question : « Est‑ce que cette entreprise change réellement quelque chose ? » Il ne s’agit pas que d’un « bon business » avec de bons métriques. Ça doit compter.
Quant au faible nombre de femmes investisseuses, cela tient sans doute aux écarts de salaire et donc au capital disponible pour investir.
Et il faut challenger l’idée de ce que signifie être investisseuse ! On pense qu’il faut beaucoup de capital, écrire de gros chèques, souvent. Ce n’est pas toujours le cas. On peut être bien plus opportuniste. J’ai vu récemment des fondateurs abaisser le ticket minimum pour les femmes. Il faut que les femmes le sachent.
J’espère que la plateforme Roundtable simplifiera beaucoup de choses et permettra de s’engager et de contribuer, aux côtés de personnes crédibles. Cela bénéficiera aux fondateurs et aux femmes qui veulent se lancer !
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